En 2020 nous avons commencé des travaux dans l’objectif de créer un fournil équipé d’un four à gueulard maçonné, auto-construit. Qu’est-ce qu’un four à gueulard ? C’est un four « à bois à chauffe directe » car la flamme est en contact direct avec la chambre du four. Cependant le foyer est décalé en dessous de la sole* ce qui permet (entre autres) de ne pas avoir à enlever les braises avant d’enfourner.
*sole : surface du four sur laquelle sont posés les pains


Nous prévoyons un foyer dont l’accès est sur le côté et non à l’avant pour deux raisons :
– améliorer le confort de l’utilisateur en limitant la chaleur au niveau des jambes
– avoir une pièce consacrée au bois, séparée de l’espace pétrissage et enfournement.
L’idée de cette page est de partager l’avancée des travaux débutés en janvier 2020 et d’être le plus explicite possible sur la partie technique.
Faire place nette
Un début de four avait été commencé il y a trois à quatre ans. Comme les plans ont évolué avec les nouveaux projets du lieu, nous avons choisi de repartir de zéro. La présence d’un petit cour d’eau longeant le fournil, la forte probabilité d’inondations chaque hiver ainsi que les 30 à 40 tonnes de matériaux qui vont constituer le four, nous obligent à prévoir des fondations solides.
Donc pour commencer, chantier taille de bois autour du cour d’eau pour faire de la place, déconstruction du muret et du socle du premier four, aplanissement à la mini-pelle. Merci à ceux qui nous ont prêté mains fortes pour ces trois premiers chantiers !
Les fondations
Pour les fondations, nous avons coulé une ceinture de 50cm de large sur 30cm de hauteur au niveau du pourtour du four. Puis nous avons coulé la chape sur une douzaine de cm qui sera la base du four.
Avant de couler les fondations, nous avons modélisé grandeur nature la sole du four sur planches de contreplaqué afin de creuser la tranchée tout autour.
Les murs du pourtour
Pour la structure du four, nous avons monté 3 rangées de parpaings (20-25), en suivant la courbure du gabarit de la sole. Nous les avons tous coupés à la disqueuse à 40 cm de long pour un gain de place, et aussi car nous avions prévu la chape pour cette longueur. Les 10 cm de parpaings restant nous serviront dans la construction du bâtiment.
Première ceinture en béton armé
Au dessus des 3 rangées de parpaings, nous avons coulé une première ceinture en béton armé, d’une largeur de 25 cm et d’une profondeur de 18 cm. Cette ceinture soutiendra la charge verticale de la voûte.
Pour le coffrage extérieur de la ceinture, pose d’une quatrième rangée de parpaings, mais dans l’autre sens (voir photos). Pour le coffrage intérieur, utilisation de planches de volige en peuplier. Pour les cintrer comme il faut, nous les avons rabotées au 1/200 de leur rayon de courbure, puis trempées dans l’eau quelques heures.
Six poteaux béton, répartis sur la périphérie de la ceinture, renforcent la structure du four. On les remarque sur les photos au niveau des planches de coffrage posées verticalement.
Le poteau situé à droite de la façade du four, sera en contact direct avec le foyer du four ; c’est pourquoi nous avons utilisé un béton réfractaire à ce niveau (plus foncé que le reste de la ceinture).
La tour continue son élévation… un nouveau rang de parpaings est monté sur le dernier.

Linteau au dessus du foyer
Le mur périphérique du four s’arrête à 70 cm avant l’entrée pour laisser l’emplacement du foyer. Sur cette partie, le poteau d’extrémité et le linteau de foyer sont coulés en béton réfractaire.
Deuxième ceinture en béton armé
On continue dans les ceintures… une deuxième est coulée pour supporter la poussée horizontale de la voûte. Elle se situe sur la moitié extérieure du mur, contrairement à la première qui se situait sur la moitié intérieure.
Le coffrage est plus complexe car il faut coffrer des deux côtés avec des planches. Toutes sont passées à la raboteuse pour être d’une épaisseur de 5 mm afin de suivre la courbure. Ceinture d’une hauteur de 24 cm par 15 cm.
Un rang de parpaings est monté sur cette deuxième ceinture.
Abri temporaire pour le four
La suite des travaux nécessite que le four soit hors d’eau. C’est pourquoi nous construisons un abri temporaire mais relativement solide.
Premier et deuxième rang de briques réfractaires
C’est bon, on y est ! Première pose de briques ! Celles-ci se situent sous la voûte, elles ne seront pas visibles une fois le four terminé mais elles contribuent à l’isolation du four.
Afin d’être au plus proche de la forme de la sole, nous avons repositionné le modèle en contreplaqué et collé les briques tout le long de celui-ci.
Pour le liant, on utilise de l’argile mélangé à de l’eau et un peu de sable (une pelle d’argile/une pelle de sable/de l’eau pour une consistance « mousseuse »).
Deuxième rang de briques posé le lendemain. Entre temps, le modèle a été enlevé.
Pose des pieds droits
Au dessus des deux rangs de briques réfractaires, ce sont les pieds droits qui ont pris place. De base carrée 14 cm par 14, d’hauteur 30 cm jusqu’à l’arrête, le haut en biseau. Cette forme particulière permet le départ de la voûte.
En dessous des pieds droits : 50% argile, 50% sable non tamisé + eau
Entre les pieds droits : idem mais sable tamisé afin que les deux faces se touchent au maximum
Murs du foyer
Création des murs du foyer où le feu sera fait. Cette partie du four étant la plus en contact avec le feu, elle se doit être très résistante à la chaleur :
– briques avec taux d’alumine plus élevé, ce qui leur donne une couleur plus claire
– pour le liant : fondu (ciment réfractaire) avec de la chamotte (briques concassées finement).
Dimensions du foyer déterminées par des pièces de fonte standardisée : la largeur et hauteur de la porte et la longueur des barreaux, soit 43 cm de large par 40 cm de haut et 70 cm de profondeur.
Points particuliers :
– passage dans le mur pour un conduit d’air, arrivant sous les barreaux, qui permettra d’alimenter le feu en oxygène ;
– les barreaux reposent à l’avant sur une aile en fonte intégrée à la porte, et à l’arrière sur un sommier (barre en fonte) posé sur deux cavités du mur.
Pour les découpes de briques nous avons une scie circulaire sur table avec arrivée d’eau pour faciliter la coupe. Cette machine nous a permis de faire des découpes assez précises.
Remplissage du four
Afin que les différentes parties du four soient au maximum indépendantes dans l’idée de les restaurer si besoin, nous avons monté un mur de parpaings autour du foyer.
Désormais nous pouvons remplir le four avec les différentes couches jusqu’au niveau de la sole :
– 70 cm de gravats 6/10
– 15 cm de Siporex (béton cellulaire isolant) en 2 couches croisées
– 6 cm de briques réfractaires déclassées en trois couches de 2 cm (masse thermique)
– 3 cm de sable à lapin
– 5 cm de sole en briques réfractaires
Pose de la façade et montage du mur en briques
N’ayant pas pu recevoir les matériaux à temps pour poser la sole du four, nous nous attaquons à la pose de la façade. Elle est légèrement inclinée (7 cm sur sa hauteur) pour ralentir la fermeture de la porte guillotine.
Sous cette façade, nous montons un mur de briques pour l’esthétique ainsi que pour s’isoler du foyer.
Coffrage et coulage du « chapeau » du foyer
Le foyer est désormais fermé par une pièce en béton réfractaire que nous avons coulé dans un moule auto-construit. A vrai dire, ce sont même deux pièces posées l’une sur l’autre. Elles épousent la forme du four et et du foyer. L’idée est de pouvoir changer ces pièces si un jour elles venaient à s’user.
Pose de la sole
Maintenant que nous avons toutes les briques nécessaires pour la suite du chantier, nous pouvons poser la sole. Ce sont des carreaux de 25 par 25 cm sur 5 cm d’épaisseur. On a fait le choix de les poser directement sur le sable, sans les sceller, pour pouvoir les remplacer facilement si besoin.
La sole présente une légère pente d’environ 1,2%, ce qui correspond à 4 cm entre le fond du four et l’entrée. Cette pente permet une meilleure circulation de la flamme et facilite légèrement le défournement des pains.
Coulage derrière les pieds droits
Afin de combler le vide entre les pieds droits et les parpaings, nous avons couler du liant chaux + chamotte. Cela permet de maintenir les pieds droits qui vont supporter les poussées de la voûte.
Construction de la voûte
Il est temps désormais de s’attaquer à la voûte du four. Nous commençons par façonner un dôme de sable sur la sole qui correspond « exactement » à la forme de la voûte. Pour cela on a découper des gabarits représentant les différentes courbures de la voûte et nous les avons placés dans le four. Le sable est tassé à plusieurs reprises, et mis de niveau avec une règle qui glisse entre deux gabarits. Remarquant que cela ne suffisait pas pour les bords du four, nous avons en plus créer deux « compas » pivotant.
Après 3 jours, le dôme est enfin prêt pour recevoir les briques !
Les briques sont posées à la verticale, recouvertes plus ou moins de liant sur les 2/3 de la partie haute de la brique, sur sa face arrière et sur le chant, selon l’équerrage nécessaire dans les deux sens. Pour le liant nous utilisons de l’argile tamisé mélangé seulement à de l’eau (texture pâte à tartiner).
Vue de dessus, la pose des briques est dite « à coupe de pierre » (c’est-à-dire croisées) et sans « dent de sabre » (sans joints alignés).
Dans les grandes courbures, en partie courante, les briques ne sont pas retaillées. Dans les petites courbures, cercles au fond du four, les briques sont retaillées en trapèze.
A l’avant du four, derrière la façade, les lignes de briques se croisent en pointe de cœur. Ces dernières sont également taillées en trapèze à l’aide d’une fausse équerre.
A l’arrière du four, deux prises de chapelle réalisées en béton réfractaire, sont positionnées symétriquement à l’axe et après la 3ème ligne de briques. Ces prises de chapelle recevant les ouras* permettront le tirage et l’évacuation des fumées.
*ouras = clapet en fonte permettant de régler l’ouverture des conduits de tirage et d’évacuation des fumées.
Couche de chamotte sur la voûte
Afin de solidifier la voûte, nous coulons une couche de mélange chaux-chamotte sur environ 4 cm d’épaisseur. Cette étape est réalisée en deux fois, d’abord un mélange assez liquide pour qu’il rentre bien dans les interstices des briques, puis un mélange plus grossier pour envelopper la voûte.
Construction des conduits de ouras
Au dessus de la voûte, nous maçonnons deux conduits qui permettront l’évacuation des fumées par les deux ouras positionnés à l’arrière de la chambre du four.
Nous coulons d’abord deux assises en chaux-chamotte. L’assise recevra le tirant qui permettra d’ouvrir ou fermer le clapet du oura depuis la façade du four. De chaque côté de l’assise, nous montons un muret en briques, posées sur la tranche, et enfin nous refermons le conduit par des briques de taille plus grande.
Afin de pouvoir visiter le conduit en cas de problème technique, et pour le ramoner, nous positionnons une trappe de visite. Nous l’avons créée avec une cornière métallique, pliée et soudée dans la forme nécessaire, puis nous avons coulé le couvercle en béton réfractaire. Ainsi le conduit est bien fermé mais le couvercle peut d’enlever au besoin.
Dernière ceinture en béton armé
Un rang de parpaings et une dernière ceinture en béton armé sont réalisés sur le pourtour du four pour le maintien général de la structure.
Découverte de la voûte
Le grand moment est arrivé… nous en sommes à devoir ôter le sable qui a permis de construire la voûte. Environ 2 mètre cube à retirer à l’aide de pioche, truelle, racloir, balai. Tout ce sable est versé sur le dessus du four afin de faire masse thermique.
Grande satisfaction de voir notre voûte de l’intérieur ! La chambre du four est prête !
Construction du conduit de cheminée
Le long de la façade du bâtiment, nous montons un conduit de cheminée avec parement en moellons, et pierres de taille au dessus du faitage.
Nous ne trouvons aucune information technique concernant la hauteur des cheminées de four à pain. Nous décidons de nous arrêter suivant les normes françaises (DTU 24.1) à 40 cm au dessus du faitage. Si le tirage n’est pas correct après les premiers essais nous monterons encore de quelques niveaux la cheminée.
Dérhumage du four
Ca y est, nous y sommes ! 5 août 2021, c’est l’heure de la première allumette pour mettre en route le four. Nous observons les premières fumées sortir de la cheminée. Il nous faut au moins une quinzaine de jours de petites chauffes quotidiennes pour monter en température l’ensemble des matériaux avec une dilatation douce et faire sortir l’humidité. On appelle cela le « dérhumage du four ».
Fondations et dalle pour le bâtiment de stockage du bois
Nous prolongeons le bâtiment existant par un bâtiment de 43 m² qui couvrira le four et servira de local de stockage pour le bois de chauffe. Pour le moment on se contente des fondations et de la dalle en béton armé… la suite viendra plus tard.
Chappe, carrelage et enduits de la pièce
- Avant la pose du carrelage, nous réalisons une chappe de 6 cm. Elle recouvre l’isolant ainsi que les tuyaux du chauffage au sol.
- Après séchage de cette chappe, nous réalisons le plancher bois de l’étage. Deux épaisseurs de plancher avec isolant entre.
- Mi-novembre, nous faisons faire les enduits des murs intérieurs. Il s’agit d’un enduit chaux-sable gratté.
- Fin novembre, nous posons le carrelage avec des carreaux en grès cérame de 60 cm par 60.
Aménagement du fournil
Février 2022… on aménage le fournil ! Pétrin, batteur mélangeur, parisien… on sent presque déjà l’odeur du pain 🙂
Nous avons opté pour un plan de travail en bois posé sur lit médicalisé. L’idée étant de pouvoir monter ou descendre la table selon l’action qu’on réalise pour être toujours à la hauteur optimale.